Un peu d’archéologie
par Evelyn Girard
J’entends dire que les recherches archéologiques intéressent les jeunes gens qui s’y livrent avec passion. Le document qui suit devrait donc capter l’attention de nos jeunes collègues et — pourquoi pas ? — celle de leurs encore plus jeunes élèves.
Il s’agit de « Recommandations » adressées à l’élève de l’école primaire qui reçoit un « cahier de devoirs mensuels », cahier qu’il devra conserver tout au long de sa scolarité. Ce cahier, institué par un arrêté déjà ancien, était encore en usage à la veille de la dernière guerre. Il recevait le premier devoir de chaque mois dans chaque ordre d’étude, devoir fait en classe et sans aucune aide. L’ensemble des travaux permettait de suivre les progrès de l’élève d’année en année. Voici donc, écourtées, ces « recommandations » :
Enfant !
Ce cahier vous est remis pour être le compagnon et le témoin de vos études durant tout le temps que vous passerez à l’école.
Tous les mois vous y remplirez quelques pages seulement : vous y écrirez le devoir que l’on vous aura donné à faire ; ce devoir vous le ferez de votre mieux, en classe, sans vous faire aider de personne de manière que ce soit bien votre propre travail et non pas celui d’un camarade ou d’un maître. Et vous continuerez ainsi jusqu’à votre sortie de l’école. (…)
Ces devoirs mensuels ainsi réunis ne formeront ensemble qu’un bien petit volume. Cependant ils seront en quelque sorte le résumé de toute votre enfance, l’histoire sommaire de vos six ou sept années d’études. (…)
Enfant ; faites en sorte de pouvoir un jour regarder cet abrégé de votre vie scolaire sans avoir à en rougir. Il n’est pas indispensable pour cela que vous soyez un des premiers élèves de votre classe : l’avantage de ce cahier, c’est précisément qu’il n’a pas pour but de vous comparer avec vos camarades, mais de vous comparer successivement vous-même avec vous-même. Il ne s’agit pas de montrer si vous êtes plus intelligent, plus habile, plus instruit que tel ou tel autre élève, mais bien de montrer chaque année, chaque mois, si vous êtes plus habile et plus instruit que vous ne l’étiez quelque temps auparavant, si vous avez tâché de valoir mieux aujourd’hui qu’hier et si vous tâcherez de valoir mieux encore demain qu’aujourd’hui..
Appliquez-vous, enfant ! (…) Appliquez-vous dès les premières pages ; si celles-ci sont remplies à votre satisfaction, vous voudrez que les suivantes soient mieux encore. Faire toujours des efforts afin de faire toujours des progrès, c’est la loi de l’école parce que c’est la loi de la vie ; les hommes y sont soumis tout comme les enfants. (…)
Enfant ! Songez encore à ceci ; on ne travaille pas pour soi seul dans ce monde, on travaille aussi pour les autres. Les petits enfants eux-mêmes sans y penser travaillent pour leur pays. Car les bons écoliers feront les bons citoyens. Si vous employez bien vos jeunes années, si vous profitez sérieusement de tous les moyens d’instruction que la République prend soin d’offrir à tous ses enfants, vous pourrez un jour rendre à la patrie ce que la patrie fait aujourd’hui pour vous. La France a besoin de travailleurs et de gens de bien. (…)
Si vous traversez quelque moment de faiblesse et de découragement, enfant, ne vous laissez pas abattre, et pour reprendre courage, dites-vous tout bas à vous-même : non je ne veux pas être un inutile sur la terre, un ingrat envers ma famille, un ingrat envers la France. Je veux travailler, je veux devenir meilleur, non pas seulement parce que c’est MON INTÉRÊT, mais parce que c’est MON DEVOIR.