Lettre au recteur de l’académie de La Réunion

mercredi 20 juin 2012

Monsieur le Recteur, Le Bureau de l'APL a eu connaissance des instructions insolites données par les IA-IPR de l'académie de La Réunion aux correcteurs de l'épreuve anticipée de français du baccalauréat – instructions orales, sans doute en raison de leur caractère hautement contestable et d'ailleurs inédit. Ces IPR ont en effet demandé à nos collègues de ne pas exiger mais de simplement valoriser l'existence d'une introduction et d'une conclusion au commentaire de texte. Ces composantes du devoir n'ont rien d'arbitrairement académique. Présenter le texte, le replacer dans son contexte historique, biographique, générique, thématique, annoncer dans quelle perspective et selon quels axes on va le commenter, tout cela constitue un préalable évidemment indispensable avant de et pour pouvoir en parler pertinemment et intelligiblement. Tirer les enseignements du commentaire qu'on vient de mener constitue pour ainsi dire la justification dudit commentaire ; la conclusion illustre la capacité du candidat à synthétiser sa réflexion et à dégager la substance singulière d'un texte. Ces compétences de lecture, d'organisation de la pensée, d'attention envers son propre lecteur ou interlocuteur sont au centre de l'enseignement des lettres et importent bien au-delà de son périmètre propre. C'est dire si les consignes de vos IPR sont aberrantes. Elles sont la négation même de la discipline qu'ils sont censés illustrer et de la principale finalité qui lui est assignée par les programmes : la formation du citoyen. Elles sont en outre une injure à l'égard de nos collègues qui s'efforcent d'apporter à tous les élèves de France, qu'ils soient de métropole ou d'outre-mer, la méthode et la rigueur indispensables à une pensée libre et structurée. Il paraîtrait par ailleurs que ces mêmes IPR aient demandé aux examinateurs de leur transmettre par téléphone leurs notes avant de les saisir selon la voie officielle, ce afin de pouvoir les « réajuster » à temps. Ce procédé constituerait une violation évidente de la souveraineté du jury. Il relèverait également de la falsification de l'évaluation des candidats, qu'il lèserait par des artifices propres à dévaluer le diplôme obtenu dans l'académie. Nous ne doutons donc pas qu'il s'agisse là d'une maladresse, dont nous vous prions de bien vouloir demander la rectification. Veuillez agréer, Monsieur le Recteur, l'expression de notre haute considération.